Logo
Imprimer cette page

Les règles juridiques relatives au sort des embryons surnuméraires

a) Considérations générales

La loi de 2007 règle différentes choses :

‐ Accès aux PMA
‐ Modalités des PMA
‐ Sort des embryons surnuméraires

Conditions de fond : à propos de ces règles de fond, on peut qualifier cette loi belge de libérale. Cette loi pose dès lors la liberté de conscience des hôpitaux et des individus qui recourent à une PMA. Les hôpitaux peuvent donc en Belgique procéder à des PMA, il n’y a donc pas d’interdiction à l’égard d’un certain type de particuliers ou de situations familiales ! Elle n’a pas interdit le recours aux mères porteuses, les bébés médicaments, elle n’a pas imposé l’anonymat dans la procréation médicalement assistée.

Les seules exceptions dans la loi sont pour les femmes d’un certain âge : 45 ans pour les demandes d’implantations et 47 pour les implantations. Il n’y a pas de limite pour les hommes dans l’intérêt des femmes MAIS il est toujours possible pour les hôpitaux de mettre des limites. On a aussi imposé la gratuité et l’interdiction de l’eugénisme.

Quant au sort des embryons surnuméraires, l’option est tout aussi libérale ! C’est un bel exemple de la disponibilité car un contrat est conclu ce qui est synonyme d’autonomie de la volonté : les individus décident !

Ce qui unit l’accès aux PMA et le sort des embryons surnuméraires est une option libérale dans le sens du passage de l’indisponibilité à la disponibilité : c’est finalement aux individus de décider. Le fait que ce soit l’homme qui décide fait l’unité de cette loi belge.

= Concept de liberté de conscience sous réserve de quelques limites (voir supra) Quant aux statuts des embryons surnuméraires, la loi belge a choisi l’option du contrat : les centres et les parents décident dans une convention qu’ils signent ce qu’il en adviendra de leurs embryons surnuméraires. Ils décideront si on les conserve, si on les détruira.

b) Le « don » d’embryon

Les parents peuvent décider par contrat si les embryons surnuméraires peuvent faire l’objet d’un don ou de recherche. C’est vraiment un exemple frappant par rapport à tout ce qu’on a pu voir sur la première famille moderne où le regard que l’on avait sur la vie humaine était synonyme d’indisponibilité. Ici, le législateur estime qu’il n’a pas à élaborer une norme juridique générale et abstraite.

-> Le législateur français n’a pas suivi cette option du contrat. Pour lui, il faudra nécessairement qu’un juge décide si tel embryon conçu par tel couple pourra être donné à tel autre couple. Ce sont vraiment deux visions très différentes du statut de l’embryon humain. Ce qui est frappant c’est qu’entre 94 en France et 2007 en Belgique, il a suffit de 13 ans pour qu’il y ait une évolution des mentalités. La loi française risque aussi d’être modifiée très prochainement.

Au niveau du sort des embryons, le législateur a élaboré deux règles qui sont hors contrat (règles générales et abstraites) :

‐ La conservation des embryons n’excèderait pas 5 ans

‐ En cas de décès d’un des partenaires du couple, ils peuvent donc convenir que l’autre pourra se faire remettre les embryons. Pour ceux qui diraient oui, le législateur a dit que cela devait se faire sous deux réserves de délais : minimum pas avant 6 mois et maximum pas au delà de 2 ans. L’objectif est d’intérêt général ! Pour la première raison c’est parce qu’on ne veut pas que cela soit en réaction au deuil et pour la deuxième c’est dans l’intérêt de l’enfant.

-> C’est très minime !

c) La séparation du couple ou le décès d’un des partenaires

1) La séparation du couple Une autre question posée par la conservation des embryons surnuméraires est celle du sort qui pourra éventuellement leur être réservé en cas de séparation du couple qui avait procédé à une FIVETE ou après le décès d’un des deux partenaires de ce couple.

Il paraît difficile de concevoir qu’en cas de séparation, un des deux partenaires puisse revendiquer un quelconque « droit de préférence » et se faire attribuer, sans le consentement de l’autre partenaire, les embryons congelés. Même si la loi du 11 mai 2003 n’avait pas tranché la question, elle avait posé le principe du consentement de « toutes les personnes concernées » pour l’affectation des embryons à des fins de recherche, et on pouvait dès lors transposer cette solution à toute restitution de l’embryon à l’un des deux partenaires aux fins de réimplantation.

On observera toutefois qu’aux Etats‐Unis, où ce type de problème a déjà été porté en justice, il avait été expressément décidé par une juridiction que l'embryon devait nécessairement être restitué à la mère, par analogie avec la situation qui se présente en cas de procréation naturelle. C’est en effet, a estimé le juge, la mère – et la mère seule – qui a le pouvoir de décider après une procréation naturelle si elle fera ou non naître l’enfant, sans que le père n’ait plus rien à en dire.

Mais il avait aussi été décidé, en sens contraire, par une autre juridiction que les deux situations étaient fondamentalement différentes et que les droits des deux parents restaient identiques aussi longtemps que la grossesse n’avait pas commencé, en manière telle que l’accord des deux géniteurs était indispensable pour décider du sort de l’embryon. Il reste que, même si on s’en tient à une règle de base qui serait celle de la décision commune des deux géniteurs, d’autres questions subsistent.

Pourrait‐on concevoir et admettre que les partenaires demandeurs d’une PMA concluent déjà, lors de la PMA, une convention réglant le sort de leurs embryons surnuméraires en cas d’une séparation ou d’un divorce ultérieurs ? Dans l’affirmative, est‐ce qu’une telle convention aurait pleine valeur juridique et engagerait les auteurs du projet parental ? Ou est‐ce qu’elle pourrait encore être révoquée de manière unilatérale par chacun des partenaires lorsque surviendrait la séparation ou le divorce ou lorsqu’après la séparation ou le divorce, un des deux partenaires utiliserait à son profit le consentement qui lui avait été donné par l’autre partenaire de disposer des embryons surnuméraires ? Y aurait‐il matière à un éventuel recours judiciaire ? On voit bien qu’a priori la solution la plus simple est assurément celle qui consiste à interdire la poursuite du processus de procréation après la dissolution du couple parental, à tout le moins lorsque les embryons surnuméraires ont été conçus avec les gamètes des deux partenaires du couple. C’est, au demeurant, ce qu’avait prévu la proposition de loi déposée le 2 mars 2005 au Sénat après les débats intervenus au sein de son groupe de travail « Bioéthique ». Mais, entretemps, le législateur a, dans la loi du 6 juillet 2007, opté, comme on l’a déjà indiqué, pour la solution « contractuelle ». Ce sont les auteurs du projet parental qui règlent en effet cette question – et ils sont tenus de le faire – dans la convention qu’ils signent avec le centre de fécondation.

2) Le décès d’un des partenaires

La question est encore plus discutée après la mort d’un des deux partenaires. Saisie de cette question, dans le cadre d’une procédure qui avait été jugée en appel avant l’entrée en vigueur des lois bioéthiques du 29 juillet 1994, la Cour de cassation de France avait, dans un arrêt prononcé le 9 janvier 1996 expressément considéré que « l’assistance médicale à la procréation ne pouvait avoir pour but légitime que de donner naissance à un enfant au sein d’une famille constituée, ce qui exclut le recours à un processus de fécondation in vitro ou sa poursuite lorsque le couple qui devait accueillir l’enfant a été dissous par la mort du mari avant que l’implantation des embryons, dernier étape de ce processus, ait été réalisée ».

Cette solution a aussi été consacrée par les lois bioéthiques françaises et n’a pas été remise en question lors de la dernière réforme opérée par la loi du 7 juillet 2011. L’article L‐2141‐2 du Code de la santé publique prévoit expressément que « l’homme et la femme formant le couple doivent être vivants » et que « font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons le décès d’un des membres du couple » (comme d’ailleurs aussi le dépôt d’une requête en divorce, la cessation de la communauté de vie ou la révocation par écrit auprès du médecin du consentement d’un deux membres du couple hétérosexuel). En Belgique, le Comité consultatif de bioéthique avait été expressément saisi de cette question et il n’était pas parvenu à formuler une recommandation unanime.

Comme c’est le plus souvent le cas en raison de la divergence des sensibilités philosophiques, idéologiques et éthiques, deux options différentes avaient été proposées :

‐ Soit l’interdiction pure et simple

‐ Soit l’acceptation de la procréation post mortem moyennant le respect de conditions limitatives, telles que le consentement écrit préalable fait par la personne concernée décédée et l’imposition d’un délai d’attente après le décès (par exemple un an), afin que le partenaire survivant effectue un choix suffisamment réfléchi.

La proposition de loi déposée le 2 mars 2005 avait adopté sur cette question une position catégorique. L’article 13 de cette proposition était en effet rédigé de la manière suivante : « à l’exception des donneurs anonymes, l’insémination post mortem est interdite. En cas de séparation du couple ou de décès d’un membre du couple, les embryons surnuméraires congelés sont détruits ».

En définitive, le législateur a, par contre, dans la loi du 6 juillet 2007, aussi préféré opter pour la solution « contractuelle ».

Ce sont les auteurs du projet parental qui veillent à préciser dans la convention qu’ils signent avec le centre de fécondation – ils sont tenus de le faire – l’affectation des embryons surnuméraires en cas de décès d’un des auteurs du projet parental. La proposition n’impose qu’une limitation de délai. L’article 16 prévoit en effet qu’ « il ne pourra être procédé à l’implantation post mortem qu’au terme d’un délai de six mois prenant cours au décès de l’auteur du projet parental et, au plus tard, dans les deux ans qui suivent le décès dudit auteur ». La loi ne règle pas, dans cette hypothèse, le statut de la filiation de l’enfant.

d) Le diagnostic préimplantatoire Enfin, la loi du 6 juillet 2007 s’est aussi montrée libérale à propos du diagnostic préimplantatoire. Elle ne l’a interdit, selon les mêmes principes que pour la sélection de gamètes, que :

‐ Lorsqu’il aurait un caractère eugénique, c’est‐à‐dire selon la définition donnée à l’eugénisme, lorsqu’il aurait pour objet de sélectionner des embryons présentant une caractéristique génétique non pathologique de l’espèce humaine

‐ Lorsqu’il serait axé sur la sélection du sexe, à l’exception de la sélection qui permet d’écarter les embryons atteints de maladies liées au sexe.

Au surplus, par dérogation à ces interdictions, l’article 68 de la loi autorise le diagnostic génétique préimplantatoire « dans l’intérêt thérapeutique d’un enfant déjà né du ou des auteurs du projet parental », mais à la condition que le centre de fécondation consulté ait estimé que « le projet parental n’a pas pour seul objectif la réalisation de cet intérêt thérapeutique ».

Ce qu’on a pu appeler le « bébé médicament » est donc, dans les limites qui viennent d’être posées, expressément autorisé en Belgique.

Copyright © 2017. All rights reserved.