L’exigence professionnelle essentielle et l’objectif légitime
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Une législation anti discrimination aura généralement recours à une liste de critères suspects, elle prévoira un cadre général permettant de déterminer à quelles conditions il doit être possible de déroger à l’interdiction de recours à de tels critères suspects. Via une série de techniques la discrimination positive consiste à discriminer au bénéfice du groupe sous représenté afin de contrer le fait que la discrimination sur base du même critère se fait généralement aux dépens de ce groupe sous représenté. A coté de cela on va aussi autoriser de discriminer sur base de critères protégés en raison du type de relation ou d’organisation sociale concernés. Une théorie du juste traitement différencié ne peut se passer d’une théorie politique relative à la fonction des différentes entités dans lesquelles nous nous impliquons.
Trois types de relations ou d’organisations successives :
1) Le mariage C’est une forme d’association dans le cadre de laquelle des formes de traitement différencié sont pratiquées et acceptées. Pensons à l’âge, un homme épousera souvent une femme plus jeune que lui, on évitera souvent un écart d’âge important. On ne sera pas intuitivement choqué par cela alors que ça a des conséquences importantes, pourquoi accepte t on cela dans le cadre du mariage alors qu’on ne l’accepterait pas dans le cadre du travail ?
D’abord, la relation de mariage touche à du plus intime, à la vie privée, par rapport au travail. Ensuite, le mariage n’est pas un contrat à durée déterminée. Enfin, la dimension biologique a une pertinence si l’on accepte de considérer que la reproduction sexuée est une des dimensions possibles de la relation matrimoniale. 2) Les Eglises ou partis politiques
On peut se demander pourquoi refuser un emploi à une personne postulant comme prêtre et ayant une parfaite connaissance de la doctrine de l’Eglise, se comportant de façon identique à celle d’un croyant, avec la seule différence qu’il n’est pas croyant.
On comprend qu’il est difficile de faire fonctionner certains types d’organisations sans une certaine forme de partage des convictions, mais on voit aussi qu’avoir une interprétation extensive de cette possibilité conduirait à vider la loi anti discrimination d’une grande partie de sa substance. La dimension du surcoût est une considération particulièrement légitime dans le cas d’une entreprise commerciale. C’est le cas d’une part cat la concurrence entre acteurs s’y joue pour part significative sur le prix des biens et services qu’elle propose et d’autre part parce que le caractère totalement/partiellement lucratif de ses finalités est accepté comme légitime.
C’est à la lumière de ceci qu’il faut s’interroger sur la façon d’interpréter l’expression « exigences professionnelle essentielle et déterminante ». D’une part on réduit la possibilité de discriminer sur base de critères suspects à des cas où il s’agit d’une exigence essentielle et déterminante, mais d’autre part des aménagements pour handicapés par exemple ne seront pas requis si ils imposent à l’entreprise des coûts disproportionnés.
Si la loi s’écarte trop d’une conception qualitative et étroite de l’idée d’exigence professionnelle elle risque d’ouvrir la porte à de nombreux cas de traitement différencié vidant la législation de beaucoup de son contenu. Mais en même temps, cela a peu de sens de s’écarter complètement d’une notion unifiée de cout qui prend en compte l’ensemble des couts liés à l’engagement d’une personne plutôt qu’une autre. Cela montre les limites du recours à une loi anti discrimination qui doit être complétée par exemple par des normes d’urbanisme.