Le nivellement pas le bas, les inégalités et les plus défavorisés
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Ce qui caractérise donc l’égalitarisme c’est qu’il se soucie des inégalités pour des raisons de justice. Pourtant, sont ce vraiment les inégalités comme telles qui préoccupent la plupart des égalitaristes ?
Considérons une première formulation possible du principe clef d’un égalitarisme classique. S1 : Un monde marqué par moins d’inégalités (problématiques) est un monde plus juste.
Il n’y a dans ce premier slogan rien de problématique à première vue, pourtant il se heurte à l’objection du nivellement par le bas. Au sens strict, cette objection renvoie plutôt à une politique qui en vue de réduire les inégalités mettrait en place des mesures qui dégraderaient le sort de quelques uns sans pour autant améliorer le sort d’aucune autre personne. On alignerait le sort de tous sur le niveau le plus bas. La situation serait moins inégale, mais comment un monde pourrait‐il être meilleur s’il est moins bon pour certains sans être meilleur pour personne ? Une majorité d’égalitaristes sont choqués par un tel nivellement par le bas. Car comment
une situation pourrait‐elle être meilleure si elle n’est meilleure pour personne ? D’où la proposition d’un slogan alternatif.
S2 : Un monde où la situation du plus défavorisé est meilleure que celle du plus favorisé dans un monde alternatif est un monde juste.
Ce slogan traduit l’intuition qui sous tend la vision des égalitaristes du Maximin ou pour être plus précis du leximin. Pour les défendeurs du Maximin il s’agit d’aller plus loin et de proposer une organisation sociale et des principes d’action qui maximisent le sort du plus défavorisé, qui maximise le minimum.
Le concept du leximin y ajoute un ingrédient supplémentaire, il renvoie à l’idée d’effectuer ces améliorations et de maximiser de façon lexicographique : on conduit d’abord le plus défavorisé au niveau du second plus défavorisé, puis on les amène tous les deux au niveau du troisième plus défavorisé, etc. Ca signifie aussi que si dan les deux mondes alternatifs envisagés, le sort du plus défavorisé ne peut être amélioré et est même dans d’un même niveau dans les deux cas, un égalitariste du leximin ne restera pas pour autant indifférent ausort du second plus défavorisé dans chacun de ces deux mondes. Il s’agit de décrire deux mondes possibles entre lesquels il nous faut choisir, d’y identifier qui
est le plus défavorisé dans chacune des deux hypothèses, puis de choisir le monde dans lequel le plus défavorisé est dans une situation meilleure que le plus défavorisé dans le monde alternatif, quelle que soit l’identité de l’individu concerné.
L’intuition centrale du leximin est que lorsque nous luttons contre les inégalités, ce ne sont pas les inégalités comme telles qui nous préoccupent. Mais plutôt qu’elles indiquent souvent que la situation du plus défavorisé en termes absolus peut encore être améliorée. Critiques par rapport au Leximin :
‐ Il ne ferait pas assez de place à l’efficience et serait trop extrême. Il réserve en réalité une place importante à l’efficience mais il ne s’en soucie que dans la mesure où les gains d’efficience peuvent bénéficier aux plus défavorisés. Pour les défenseurs de l’égalitarisme du leximin, il faut donner priorité aux plus défavorisés, même si les couts financiers sont très élevés pour le plus favorisé. Il est certes possible d’amender le leximin en ajoutant une clause telle que cette priorité pour le plus défavorisé soit atténuée si les pertes d’efficience sont trop élevées mais cela n’est en rien requis pour un défenseur du leximin .
‐ Il apparaît trop timide pour les égalitaristes classiques, car laisser filer trop loin les inégalités c’est menacer la possibilité pour 2 individus de continuer à se regarder comme des égaux au sens le plus basique.