Parents désunis
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1. Principe
a) Poursuite de l’exercice conjoint de l’autorité parentale Art 374, al 1 C civ
C’était un sacré changement en 1995, parce qu’avant on disait que quand les parents divorçaient, on disait qu’un des parents allait plus héberger l’enfant que l’autre et donc allait avoir la garde de l’enfant. Celui qui avait la garde de l’enfant avait le pouvoir de prendre les décisions seules (droit de garde et droit de prendre des décisions). En 95, on a supprimé le terme de droit de garde et le terme de garde est devenu très compliqué ! Depuis 1995, il est donc prévu le principe de la poursuite de l’exercice conjoint de l’autorité parentale même en cas de désunion de ceux‐ci.
-> Les parents doivent continuer à décider ensemble, ou plus exactement qu’une des parents ne peut prendre une décision relative à la personne de l’enfant ou à la gestion des biens de celui‐ci sans que l’autre ne soit d’accord (art 374, al 1 et 376)
Risque de conflits et de “coups de force” plus élevé, d’où des recours judiciaires plus fréquents dans cette hypothèse.
Appréciation de la bonne foi du tiers influencée par la désunion des parents nécessitant une plus grande prudence des tiers s'ils ne veulent pas être considérés comme étant de mauvaise foi. Le seul fait que les tiers savaient que les parents étaient séparés ne suffit néanmoins pas pour les considérer automatiquement comme étant de mauvaise foi.
b) Détermination des modalités d’hébergement de l’enfant
1) Principe et évolution
Article 374 § 1 dernier alinéa C civ : nécessité pour le juge compétent de déterminer dans tous les cas les modalités d’hébergement de l’enfant et le lieu où il sera inscrit dans les registres de la population (ou d’entériner l’accord des parties quant à ce s’il le juge conforme à l’intérêt de l’enfant).
‐ Terminologie : hébergement principal, hébergement secondaire, subsidiaire, alterné, égalitaire, etc.
‐ Modalités d’hébergement déterminées conformément à l’intérêt de l’enfant dans chaque cas d’espèce.
‐ Evolution :
o Antérieurement, « droit de garde matérielle » majoritairement accordé à la mère, le père exerçant un « droit de visite » le plus souvent un week‐end sur deux et la moitié des vacances et congés scolaires.
o Loi du 13 avril 1995 : consacre la « coparentalité » via le principe de l’exercice conjoint sans pour autant fixer de principe ou donner d’indications légales quant aux modalités d’hébergement de l’enfant (ce qui engendrait, pour certains, une forme d’imprévisibilité des litiges à défaut de « modèle législatif)
o Evolution de la jurisprudence et des demandes des pères : de plus en plus de tribunaux octroient des droits d’hébergement « élargi » (par exemple un weekend sur deux plus une nuitée par semaine, ou autres formules telles que le « 9/15 » – par exemple du mercredi au lundi matin une semaine sur deux) ou un hébergement alterné égalitaire (une semaine/une semaine par exemple).
Donc lente érosion de la prépondérance accordée à la mère, découlant de l'évolution du contexte sociologique actuel, de l'exercice par les femmes d'une profession et de la modification de la répartition des tâches parentales dans la vie quotidienne.
o Contrairement au régime antérieur, la loi du 18 juillet 2006 donne une indication claire au juge amené à trancher en ce qu’elle lui enjoint d’examiner « prioritairement, à la demande d’un des parents au moins, la possibilité de fixer l’hébergement de l’enfant de manière égalitaire entre ses parents ». Ce n’est donc que « si le tribunal estime que l’hébergement égalitaire n’est pas la formule la plus appropriée » qu’il « peut décider de fixer un hébergement non‐égalitaire », ceci dans un jugement devant en tout état de cause être « spécialement motivé, en tenant compte des circonstances concrètes de la cause et de l’intérêt des enfants et des parents (art 374, § 2 C civ)
C’est donc à la mère de prouver que ce n’est pas ce qui correspond à l’intérêt de
l’enfant : il y a une sorte de présomption réfragable que l’hébergement égalitaire est la meilleure solution ! Quelles sont les contre indications ? Enfant très jeunes : ce n’est pas toujours la meilleure solution
Distance géographique entre les lieux de résidences des parents
Disponibilité
2) Qui décide ?
‐ Il revient aux parents, qui sont les plus à même de décider en la matière, de trouver un accord quant aux modalités d'exercice de l'autorité parentale et d'hébergement de l'enfant. Cette solution d’entente peut être trouvée par les parents eux‐mêmes avec ou sans l’aide de tiers tels que leurs avocats (négociation) ou encore dans le cadre d’une médiation familiale. Selon le nouvel article 374 § 2 alinéa 1 du Code civil, le tribunal saisi par les parents qui ne vivent pas ensemble homologue leur accord sauf s’il est manifestement contraire à l’intérêt de l’enfant.
‐ A défaut d'accord des parents (ou si l'accord des parents est considéré comme contraire à l'intérêt de l'enfant), l’article 387bis C civ prévoit que le juge compétent tente de concilier les parties ; il leur donne toutes les informations utiles sur la procédure et sur l’intérêt de recourir à une médiation. S’il constate qu’un rapprochement est possible, il peut ordonner la surséance de la procédure afin de permettre aux parties de recueillir toutes les informations utiles sur la médiation et d’entamer celle‐ci. Le tribunal peut aussi, même d’office, ordonner une mesure préalable d’instruction de la demande ou une mesure préalable de nature à régler provisoirement la situation des parties pour un délai qu’il détermine. Si aucun rapprochement n’est possible et si une médiation ne paraît pas être de nature à permettre un tel rapprochement, le juge tranche en fonction de ce qu'il estime être l'intérêt de l'enfant.
‐ L’article 387bis C. civ. prévoit par ailleurs en ce qui concerne le tribunal de la jeunesse que lorsqu’il est saisi pour la première fois, il statue à titre provisionnel. La cause peut donc être réexaminée à une audience ultérieure, soit à une date fixée d’office dans le jugement (dans un délai maximum d’un an), soit à une date plus rapprochée en cas d’éléments nouveaux (via le dépôt de nouvelles conclusions ou une demande écrite déposée ou adressée au greffe).
La cause reste inscrite au rôle du tribunal de la jeunesse jusqu’à ce que les enfants concernés par le litige soient émancipés ou majeurs.
3) Moyens d’investigation dont le juge dispose
Le juge peut avoir recours à différentes mesures pour être plus éclairé dans la détermination de l’intérêt de l’enfant.
‐ Audition de l’enfant (art 391, al 3 et s C jud) : l’article 931 prévoit que le mineur de moins de 15 ans ne peut être entendu sous serment et il interdit l’audition des descendants « dans les causes où leurs ascendants ont des intérêts opposés ».
Le mineur peut néanmoins être entendu dans toute procédure le concernant s’il est « capable de discernement ».
o Personnes pouvant demander l’audition du mineur
-> Le mineur lui‐même, sans aucune formalité particulière à respecter. Le juge ne peut refuser d'entendre l'enfant qui le demande que s'il estime que celui‐ci n'a pas le discernement suffisant (décision non susceptible d’appel).
-> Le juge, d'office, s'il l'estime nécessaire, mais le mineur peut toujours refuser (art. 931, al 5 C jud)
-> Les parents peuvent suggérer au juge de décider d'entendre l'enfant mais c'est le juge qui décide de l'opportunité de cette mesure.